K. (fr)
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Fondé sur des faits réels, proches de l’auteur, le récit romancé nous fait découvrir un pan de l’histoire brésilienne assez méconnu en Europe, contrairement au passé argentin similaire : les exactions du pouvoir militaire au Brésil des années soixante à quatre-vingt. Écrit du point de vue du personnage de K., il raconte la recherche de sa fille, disparue comme des milliers d’autres civils du fait des services de la dictature. À travers ce récit, se reconstitue une époque, mais aussi se révèlent les mécanismes universels du totalitarisme. Une oppression aveugle qui anéantit, dans tous les sens du terme, l’individu : celui-ci n’existe plus, il est simplement effacé.
Mais bien vite, on sent le sujet se densifier, ne fût-ce que parce que K. a fui une autre oppression politique, des années auparavant, dans sa Pologne natale. Derrière cette expérience, se profile en filigrane le destin errant du peuple juif, son insécurité, son espoir, déçu, de retrouver un sol ferme sur un nouveau continent.
On découvre alors, avec K., la communauté juive à São Paulo, son petit peuple, ses commerces, ses habitudes, son organisation. On redécouvre aussi une langue, le yiddish, en voie d’effacement. K. va plus loin encore. Certes, c’est la quête d’une enfant et on suit avec empathie la souffrance du père qui veut la retrouver. Mais à travers cette recherche, c’est un message existentiel, applicable à chacun, dans tous les pays et toutes les cultures, qui nous est proposé : qui est-on ? Existe-t-on vraiment ? Aux yeux de qui, de quoi ? N’existe-t-on que lorsque quelqu’un vous cherche ? Et n’est-ce pas alors trop tard ? Il n’est pas étonnant dès lors que le titre reprend le « nom » abrégé du personnage du Procès de Franz Kafka. Ce que le roman représente aussi au-delà d’une lecture historique et sociologique, c’est une fable philosophique qui nous emmène dans les régions inexplorées de nous-mêmes : comment arracher les bribes de vie à ce qui n’est même pas la mort, mais l’inexistence.
Roman émouvant, K. nous charme par l’ambiance magique, étrange qu’il crée. Il nous ébranle aussi par sa construction en chapitres apparemment distincts les uns des autres et par son chemin labyrinthique, ainsi que par son style elliptique. K. n’est pas qu’un témoignage fort, il est aussi une oeuvre littéraire qui se distingue par la qualité de l’écriture. Une écriture originale toute en retenue qui colle parfaitement à son sujet.
Après l’Allemagne, le Royaume-Uni, le Japon, l’Argentine, l’Italie, et d’autres pays encore, il est important que la France découvre à son tour cette oeuvre forte et la personnalité remarquable de son auteur.