Le 2 novembre 1841, la foule déchiquetait, dans sa maison de Kaboul, un brillant officier britannique au service de la Compagnie des Indes, sir Alexander Burnes. Il était la victime indirecte de l’affrontement de longue haleine qui opposait, au sein du royaume d’Afghanistan ou de ce qui en tenait lieu, Russes soucieux de pousser leur avantage en direction des mers chaudes et Britanniques inquiets de les contenir au nord de l’Hindu Kuch. Burnes connaissait sur le bout des doigts tous les acteurs et tous les ressorts de cette rivalité, et, lors de plusieurs missions, avait accumulé informations et amitiés.
La publication de sa mission de 1836-1838, en elle-même passionnante par ce qu’elle montre des réalités « pakistanaises » (on ne parle alors que du Sind et du Pendjab) et afghanes, nous vaut une formidable introduction de Michael Barry qui montre combien la situation actuelle se situe, à bien des égards, dans la continuité des deux siècles précédents, les Etats-Unis n’ayant fait que prendre le relais des Britanniques. Entre l’Empire russe et les Occidentaux, l’Afghanistan constitue un tampon toujours efficace même lorsqu’il est morcelé et en proie aux convulsions. Le dossier historique de Nadine André qui clôt le volume n’est pas moins passionnant, même s’il est davantage centré sur la mission Burnes et la première guerre afghane.