Le temps des fruits
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" Le titre du livre évoque la venue du printemps. Pourtant, les créatures du Temps des fruits traversent un paysage rude, violent, découvert par l’homme depuis peu. Héritiers de mythes et de souvenirs épars, ils ne conservent, du paradis terrestre primitif, que des lambeaux de rêves, des traces d’un monde épique disparu. En leur qualité de pèlerins, ils explorent le désordre de la réalité, tout en aspirant à l’éloquence des gestes dramatiques, à des sentiments d’une densité archéologique. Quasiment aphasiques, privés du prestige du verbe et de la voix, des bruits polysémiques, il ne leur reste que l’héritage d’émotions funestes, passionnées, sauvages et de gestes subtils, distraits, parfois raréfiés. "
Ainsi s’exprime Nelida Piñon à propos de ce recueil de nouvelles, écrites à l’âge de vingt-huit ans. Leur ton précis, que l’on pourrait qualifier d’anti-lyrique, contraste avec une thématique obsédante : celle du désordre instauré par le corps dans un monde aveugle, inerte, proprement insensible. Avec l’être humain et le désir apparaît la faille qui mène à l’expression et à la parole, ce liseré de conscience qui à la fois promeut l’avènement du monde et génère sa perdition.
Peut-on parler de " personnages " à propos de ces êtres sans noms, qui évoluent à travers le recueil ? " l’homme ", " la femme ", " le frère ", " la mère " : Nelida Piñon se dirige à pas sûrs vers une forme de narrativité à la limite de la parabole. Un ton à la fois pesant, lancinant et pudique nous mène aux confins d’un monde humain gouverné par la découverte, toujours violente, érotique ou mortelle, du désir, " de la vérité ".
A travers ces textes qui fonctionnent comme une véritable archéologie de la chair et de l’inconscient, à travers ces meurtres, ces enterrements, ces déchirements qui gouvernent l’univers de ces nouvelles, c’est aussi " le sens de la gravité de la vie " que cherche à nous transmettre Nelida Piñon.